Mars 2020. La COVID-19 a bouleversé le système de santé français, mettant (encore plus) en évidence des dysfonctionnements.
Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, donne alors rendez-vous à tous les acteurs du système de soins lors d’une grande concertation appelée « Ségur de la santé ». 50 jours pour échanger, du 25 mai 2020 au 10 juillet 2020.
Entre deux vagues de la pandémie, cette concertation fait ressortir les principaux axes sur lesquels agir.
Parmi eux, l’e-santé. L’un des enjeux majeurs en France.

Découvrons ensemble ce qu’est le Ségur de la santé et l’évolution numérique que va connaître le système de santé en France.

 

Le Ségur de la santé, concrètement, c’est quoi ?

Son nom lui vient de l’adresse du ministère de la Santé (la rue Ségur à Paris). 

Le Ségur de la santé, c’est d’abord une grande concertation, dont l’objectif était d’établir un plan d’actions à mettre en place au plus vite. 

Finalement, cette concertation, c’est :

  • Des réunions territoriales pour avoir des retours d’expériences de professionnels de santé sur les réalités du terrain
  • Des participants à la consultation en ligne pour permettre au plus grand nombre de s’exprimer
  • 90 parties prenantes (ARS, Assurance maladie, ordres professionnels, élus, etc.) et organisations syndicales (CFDT, SNAM-HP, CMH, etc.)
  • 100 réunions bilatérales : des échanges entre différents partenaires sur une thématique de santé en particulier

À l’issue de cette concertation, une première mesure se dégage nettement.
Le Ségur de la santé est souvent associé à l’augmentation des salaires des professionnels de santé. En effet, c’est cette mesure qui est apparue comme la première réponse du gouvernement. Le but ? Renforcer l’attractivité de l’hôpital public et revaloriser les soignants.  

Mais ce n’est pas seulement ça.

La concertation portait aussi sur des sujets comme l’organisation des soins dans les territoires, l’investissement financier, le numérique en santé, la psychiatrie, la recherche, la lutte contre les inégalités de santé, mais aussi la santé des personnes âgées et des personnes handicapées.
Une seule mesure sur les salaires est donc loin d’être suffisante.

Après ces 50 jours d’échange, Olivier Véran a présenté les conclusions de ce Ségur de la santé le 21 juillet 2020. 

Quatre grands piliers ont été mis en évidence pour continuer à moderniser le système de santé français, améliorer le quotidien des soignants et la prise en charge des patients :

  • Pilier 1 : Transformer les métiers et valoriser celles et ceux qui soignent
  • Pilier 2 : Définir une nouvelle politique d’investissement et de financement au service de la qualité des soins
  • Pilier 3 : Simplifier les organisations et le quotidien des équipes de santé pour qu’ils se consacrent en priorité à leurs patients
  • Pilier 4 : Fédérer les acteurs de la santé dans les territoires au service des usagers

De ces piliers découlent 33 mesures pour atteindre les objectifs. 

Nous sommes entrés dans la deuxième année du Ségur de la santé. En complémentarité avec « Ma Santé 2022 » (qui a pour objectif une meilleure organisation entre professionnels et l’accès aux soins pour tous), il est temps de passer à l’action. 

Dans le deuxième pilier, 19 Md€ seront investis sur 10 ans pour financer ces transformations. Dont 2 Md€ pour le numérique dans la santé.

 

Le programme du Ségur de la santé pour le numérique en santé

Ce volet spécifique a été identifié pour développer le numérique dans la santé et rattraper le retard accumulé (en termes d’interopérabilité, réversibilité et convergence). Il est piloté par la Délégation ministérielle au Numérique en Santé.

Cette première année du Ségur a permis de poser les fondamentaux pour avoir des outils modernes et fiables en santé. Maintenant, il est temps de mettre en pratique ce travail dans le parcours de soin du patient. 

Objectifs :

  • Généraliser le partage d’informations et de documents de manière sécurisée entre les professionnels de santé et les usagers. L’objectif est de passer de 10 millions à 250 millions de documents médicaux échangés d’ici 2 ans. 
  • Faciliter le parcours de soin des usagers qui peut parfois s’avérer être un vrai parcours du combattant. 

Pour répondre à ces objectifs, plusieurs programmes s’articulent autour des acteurs de la santé pour accélérer la transformation numérique sur le terrain.

 

Pour les établissements de santé

Le programme Ségur Usage Numérique en Établissements de santé (SUN-ES) s’adresse aux établissements de santé et est suivi par la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS).

Il a pour but de développer le système d’information de ces établissements, quels que soient leur taille, leur statut et leur activité pour une meilleure prise en charge des patients.

Trois objectifs ont été fixés :

  1. Alimenter « Mon Espace Santé » (cf. ci-dessous) et permettre le partage de documents de santé, par l’intermédiaire du Dossier Médical Partagé (DMP).
  2. Promouvoir la messagerie sécurisée de santé, tant auprès des professionnels de santé que des usagers.
  3. Associer l’Identité Nationale de Santé (INS) à tous les documents de santé transmis (cf. Décret 2019-1036 du 8 octobre 2019).

Pour bénéficier d’un financement, l’établissement de santé doit soumettre sa candidature à l’ARS de sa région et répondre à certains critères d’éligibilité.

 

Pour les professionnels de santé libéraux

L’avenant 9 à la convention médicale a été signé le 3 juillet 2021 par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) et trois syndicats représentant les médecins libéraux – MG France, Avenir Spé-le Bloc et la Confédération des Syndicats Médicaux Français (CSMF). 

Le but ? Tirer un enseignement de la pandémie et adapter le système de soin pour les usagers et les professionnels. 

Deux objectifs ont été mis en lumière concernant le numérique en santé : 

  • Consolider le parcours de soins, en soutenant notamment les spécialités cliniques et en fixant un nouveau cadre à la téléconsultation et la télé-expertise 
  • Accompagner le virage numérique de la médecine de ville

Pour permettre ce virage, l’Agence du numérique en santé a mis en place des feuilles de route différentes pour chaque professionnel. Et l’assurance maladie met à disposition un budget de 800 millions d’euros pour atteindre les objectifs.

 

Pour les établissements et services médico-sociaux

Le programme ESMS numérique est dédié aux établissements et services médico-sociaux. Il est piloté par la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA). 

Tous devront remplir le DMP quand ils auront des documents à transmettre et communiqueront par messagerie sécurisée.

 

Mon Espace Santé, pour faciliter les échanges avec le patient

Mon Espace Santé permettra à chaque utilisateur de stocker et partager des documents de santé sans se préoccuper de la protection des données.
D’un côté, le patient pourra faire parvenir ses documents aux professionnels de santé qui en ont besoin tout au long de son parcours de soins.
De l’autre, les acteurs de santé pourront utiliser cet espace pour partager les documents du patient. Du résultat d’une analyse biologique (laboratoire) à la prescription ou lettre de liaison (médecin traitant) en passant par le compte-rendu d’hospitalisation (hôpital) ou encore les images d’une radiographie (centre d’imagerie médicale)… tout sera centralisé dans l’espace du patient.

Mon Espace Santé dispose ainsi de 4 fonctionnalités :

  • Le Dossier Médical Partagé : mis en place fin 2018, les professionnels de santé peuvent l’alimenter avec les documents médicaux du patient. Cependant, il est encore trop peu utilisé.
    Le patient y a accès ainsi que les professionnels de santé autorisés. 
  • La messagerie sécurisée : elle permet les échanges entre les équipes de soins de manière sécurisée. 
  • L’agenda : il permet de voir l’historique de ses rendez-vous, mais aussi d’avoir des rappels pour ceux à venir. Le patient reçoit des alertes lors des campagnes de dépistage pertinentes pour lui (par exemple : dépistage du cancer du sein pour les femmes de 50 à 74 ans). 
  • Le catalogue d’applications : l’État a sélectionné plusieurs applications de santé qui sont compatibles et accessibles depuis Mon Espace Santé.
    L’État prend en charge la mise en conformité des logiciels qui parfois ne permettent pas d’intégrer le DMP ou la messagerie sécurisée.

Cet espace est actuellement en test depuis plusieurs mois dans 3 départements : en Haute-Garonne, Somme et Loire-Atlantique. Il sera progressivement mis à disposition de toute la population dès janvier 2022.
L’usager dispose de 6 semaines à compter de la réception du courrier d’invitation pour s’y opposer.

 

Ségur de la santé : et la plateforme de coordination Entr’Actes, dans tout ça ?

L’équipe d’Entr’Actes suit de très près les avancées de la feuille de route de la e-santé et du Ségur de la santé.

Sans même attendre les directives nationales, la plateforme de coordination Entr’Actes a œuvré pour développer ses fonctionnalités et fait désormais partie des applications compatibles avec Mon Espace Santé. Entr’Actes intègre notamment 4 fonctions :

  • L’Identité Nationale de Santé (INS) : tout bénéficiaire de l’Assurance Maladie, qui dispose d’un numéro de sécurité sociale, bénéficie d’un identifiant unique, l’INS. Cet INS est utilisé par les professionnels de santé, qui enrichissent alors les données de santé de l’usager en question.
    Cet identifiant facilite les échanges et le partage de données de santé entre les acteurs sanitaires et médico-sociaux autour de la prise en charge de l’usager.
    Entr’Actes utilise cet INS pour identifier le patient qui nécessite une prise en charge.
  • Pro Santé Connect : cette API (Application Programming Interface) permet d’identifier les professionnels de santé sur un service en ligne ou logiciel à partir du Répertoire Partagé des Professionnels de Santé (RPPS). Cela permet donc une authentification fiable et sécurisée des soignants sur la plateforme de coordination Entr’Actes.
  • Le DMP : les bilans et documents importés dans Entr’Actes par les professionnels de santé alimentent automatiquement le DMP.
  • La messagerie sécurisée : les professionnels de santé peuvent échanger dans Entr’Actes de manière sécurisée.

 

Finalement, le Ségur de la santé n’est, entre autres, qu’un moyen de rassembler et de connecter les acteurs de santé, les éditeurs de logiciels et les usagers du système de santé, pour améliorer le partage d’informations, la coordination entre professionnels de santé, et bien sûr la prise en charge des patients.